victimes attentat

(samedi 6 décembre 2003, 15h40)

Chirac s'estime incompris sur les droits de l'homme en Tunisie

Par Sophie Louet

TUNIS (Reuters) - Jacques Chirac a annoncé samedi que les négociations avaient repris avec la Libye sur l'indemnisation des familles des victimes du DC-10 d'UTA, et a mis en garde Tripoli contre des conséquences "négatives" en cas de non-respect de ses engagements.

"Les contacts entre les représentants des familles des victimes du vol UTA et les représentants de la Fondation Kadhafi ont repris", a dit le président français lors d'une conférence de presse à l'issue du sommet euro-méditerranéen "5+5" à Tunis.

"C'est toujours très compliqué les relations avec la Libye, je le dis sans agressivité. Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet depuis deux jours", a-t-il ajouté.

Les contacts ont été renoués jeudi à Tunis, en marge du sommet "5+5", entre les délégations libyenne et française, a-t-on indiqué dans l'entourage de Jacques Chirac. Le président français et le colonel Kadhafi n'ont pas eu d'échange à ce sujet, a-t-on ajouté.

Le forum "5+5", lancé en 1991, réunit cinq Etats du sud de l'Europe (Portugal, Espagne, France, Italie, Malte) et les cinq Etats membres de l'Union du Maghreb arabe (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Mauritanie).

Les négociations sur l'indemnisation des proches des 170 victimes - de 17 nationalités différentes dont 54 françaises - de l'attentat de septembre 1989 contre le DC-10 d'UTA avaient été suspendues à la mi-octobre. Les familles avaient lancé cette semaine un appel au président français pour qu'il favorise leur reprise.

"Honnêtement, j'avais imaginé qu'à l'occasion de cette reprise une solution pourrait intervenir. Pour le moment, elle n'est pas intervenue, et le règlement définitif de cette douloureuse question n'est pas fait. Croyez-bien que je le regrette", a dit Jacques Chirac.

"Les engagements pris il y a déjà un certain temps - au plus haut niveau de l'Etat libyen - doivent être tenus.

A défaut, nous devrions en tirer toutes les conclusions", a prévenu Jacques Chirac.

"Cela pourrait avoir certainement et malheureusement un effet négatif sur la relance de nos relations bilatérales et sur la pleine réintégration de la Libye dans la communauté internationale", a-t-il précisé.

"APURER LE PASSE"

Lors de sa visite d'Etat au Maroc, le 11 octobre, Jacques Chirac avait déjà prévenu que la France tirerait "sans agressivité" mais "sans faiblesse" les conséquences d'un échec des négociations.

La Libye est toujours sous le coup d'un embargo militaire européen sur les "matériels sensibles" (radars...) et de restrictions à la circulation des personnes.

Le président de la Commission européenne, Romano Prodi, a déclaré vendredi au colonel Kadhafi que l'Europe "tendait la main" à la Libye afin "d'apurer le passé".

"Je suis tout à fait désireux de voir la Libye réintégrer la communauté internationale et nous sommes particulièrement attachés à retrouver avec la Libye des relations normales", a confirmé samedi Jacques Chirac.

Le président français, qui n'a pas adressé la parole au dirigeant libyen durant le sommet de Tunis, avait appelé de ses voeux vendredi "une relation pleine et confiante" avec la Libye.

Un accord de principe a été conclu en septembre entre les familles des victimes de l'attentat du DC-10 et la fondation Kadhafi, dirigée par l'un des fils de Mouammar Kadhafi, Seïf al-Islam Kadhafi.

Ce dernier accuse depuis lors Paris d'avoir renié ses engagements, évoquant un document confidentiel signé entre Tripoli et les autorités françaises, également en septembre.

Il affirme que les négociations ne pourront reprendre tant que la France refusera notamment de discuter de contreparties financières pour la mort de trois aviateurs libyens tués par l'armée française dans les années 80 au Tchad.

Les négociations dans le dossier du DC-10 d'UTA ont été relancées au mois d'août après le versement par Tripoli de 2,7 milliards de dollars aux familles des 270 victimes de l'attentat contre un Boeing de la Panam en décembre 1988 au-dessus de Lockerbie, en Ecosse. Cette percée a conduit l'Onu à lever ses sanctions contre Tripoli en septembre.

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