victimes attentat

(mercredi 23 mai 2007)

L'homme qui a su apaiser les familles de victimes


Hier, La Fondation chargée d'indemniser les familles des victimes de l'attentat contre le DC10 d'UTA, qui avait explosé le 19 septembre 1989 au-dessus du Niger, tuant 170 personnes, a annoncé que son action touchait à sa fin.

À la tête de la Fondation, Daniel Labetoulle, ancien membre du Conseil d'État.
« Nous songeons à organiser notre disparition. Notre action est pratiquement terminée.» C'est en ces termes que Daniel Labetoulle a présenté hier le bilan de la Fondation. En 2004, cinq ans après la condamnation, par contumace, de six Libyens responsables de l'attentat contre le DC10 d'UTA en 1989 au-dessus du Niger, les parties libyennes et françaises étaient parvenues à un accord de réparation: les familles des victimes s'engageant à ne pas poursuivre l'État libyen recevraient un million de dollars (0,74milliond'euros) par victime, de la part d'une « Fondation internationale Kadhafi pour les associations charitables » créée pour l'occasion. Mais comment réparatrices 170 millions de dollars (134,5 millions d'euros) en toute équité ? Pour mener cette tâche, il fallait quelqu'un qui soit à La fois rigoureux et humain. «J'ai choisi Daniel Labetoulle, explique Olivier Grémont, directeur adjoint de la Caisse des Dépôts, parce que ce président de la section du contentieux au Conseil d'État était connu autant pour sa compétence technique que pour son humanité, son honnêteté, son éthique.» «Nous avions besoin d'une autorité morale pour cette mission très délicate, aux frontières de la diplomatie, du droit et des relations humaines», renchérit Francis Grégoire, directeur des études de la Caisse des dépôts.

La fondation a dû, en effet, définir des règles de répartition qui ne spolient personne et apaisent un peu la douleur de chacun. Pas question de reprendre tel quel le droit successoral français ou celui des pays africains concernés. En dialoguant avec les familles, le conseil d'administration de la fondation - où les associations de victimes sont représentées - a établi une hiérarchie des ayants droit: le fils de la victime reçoit une plus grande part que le frère, qui lui-même obtient plus que le demi-frère, etc. «Daniel Labetoulle a protégé particulièrement les conjoints et les mineurs, dont certains risquaient d'être spoliés par des proches, », souligne Emmanuelle de Saint-Marc, dont le beau-père est mort dans l'attentat. Elle sourit en ajoutant : « Il est, réellement, le défenseur de la veuve et de l'orphelin. »

Aujourd'hui, plus de 95 % des fonds ont été versés à 1 250 ayant droit dans 17 pays. Le reste, qui concerne une centaine de personnes, surtout en Afrique, est bloqué par l'absence de documents d'état civil ou par des procédures judiciaires entre personnes revendiquant des liens avec les victimes.
La fondation ne pourra se saborder que lorsque ces litiges auront été réglés, note Daniel Labetoulle, visiblement satisfait d'avoir presque achevé sa mission et d'avoir réussi, avec une «gestion économe», à autofinancer la fondation avec les intérêts des 170 millions.


FRÉDÉRIC NIEL

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